CARTEAUX Jean-Pierre

 

1960 - 2011

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` sommaire

 

ELOGE

 

C'est avec une grande tristesse, une peine profonde non dissimulée, dans un lieu qu'il a encore récemment fréquenté, que je viens évoquer devant vous, la mémoire de notre regretté collègue, notre ami Jean-Pierre Carteaux. C'est à l'élève, au collaborateur, à l'homme et à l'ami que je souhaite m'adresser, je le ferai au présent, tu restes pour moi, toujours parmi nous.

Originaire de Haute-Saône, c'est à la Faculté de Médecine de Besançon que tu as choisi de t'accomplir. L'internat a guidé tes pas à Nancy. Notre première rencontre a eu lieu en mai 1986, lorsque tu as débuté ta chirurgie dans le service du Professeur Mathieu. Je me souviens très bien du jeune interne que tu étais, gai, joyeux, ébouriffé, les cheveux en bataille, la chemise entrouverte, même en hiver, pétillant d'idées. Dans ta vie quotidienne d'Interne, tu faisais déjà preuve de beaucoup d'humanité dans tes rapports avec les patients et leurs familles. Déjà, dès cette époque, tu révélais ton aptitude à la recherche et, très tôt tu as su faire revivre le laboratoire de Chirurgie Expérimentale grâce à un travail et une implication sans faille, jusqu'à la création d'une équipe d'accueil quelques années plus tard. Tu as largement contribué à faire vivre l'Ecole de chirurgie qui est devenue ce lieu de formation et de recherche dont la Faculté et l'Université ne peuvent que s'honorer. La chirurgie cardiovasculaire, discipline en plein essor dans les années 1990, avec les greffes, les cœurs artificiels, t'a séduit et tu es venu me faire part de ton souhait de t'engager dans un clinicat en chirurgie cardio-vasculaire.

Avant de débuter ce clinicat, ton goût pour la recherche t'a conduit à Bâle dans le Laboratoire de recherche de Jean-Paul Clozel dans le domaine de l'interface sang-biomatériaux, le quotidien d'un chirurgien cardiaque. Durant ton clinicat outre ta forte implication dans le domaine de la clinique, que de projets réalisés au laboratoire de Chirurgie Expérimentale en particulier dans le domaine de la transplantation et de la conservation d'organes. Entre-temps, tu as souhaité passer une année de Clinicat à Paris, dans le service prestigieux du Professeur Carpentier. En 1998, tu accèdes au rang de Professeur des Universités en chirurgie cardiovasculaire, tu es alors mon premier collaborateur, celui avec qui le Professeur Mathieu et moi-même allons bâtir la chirurgie cardio-vasculaire du CHU et de la Faculté de Médecine. Accédant à cette responsabilité hospitalo-universitaire, tu as su exprimer pleinement tes qualités de chirurgien cardiaque.

Je veux souligner ton aptitude indéniable à assumer les fonctions d'enseignant, sans oublier le rôle essentiel que tu as toujours eu à l'Ecole de Chirurgie. Je souhaite souligner aussi ton implication dans les projets de coopération internationale par les missions en Chine et au Cambodge dans le cadre de missions humanitaires de la Chaîne de l'Espoir. Durant cette période, notre collaboration dans la conduite de la chirurgie cardiovasculaire s'est déroulée dans la plus grande sérénité avec beaucoup de complicité et je souhaite te témoigner devant vous tous, toute ma reconnaissance pour les conseils, les observations et même les critiques que tu savais faire prévaloir sans que jamais cela ne soit source de conflit.

L'homme que j'ai fréquenté 12 heures par jour pendant plus de 2 décennies, je pense bien le connaître ; Jean-Pierre, ta disponibilité, ta gentillesse, l'empathie que tu as manifestée avec les malades et leur famille, tels sont les mots qui me viennent à l'esprit aujourd'hui. Au nom de toutes et de tous, je souhaite rappeler à quel point tu es apprécié, tu as suscité respect et amitié et considération. Jusqu'à la fin, nos échanges emprunts d'estime réciproque ont toujours été marqués par une liberté de propos qui ne laissait que peu de place au non-dit.

Jean-Pierre, je perds un ami. Tu laisses, les plus jeunes de nos collègues, orphelins, interrogatifs sur leur avenir. Le mal, la souffrance, la difficulté à exister, à vivre comme tu me l'avais exprimé à plusieurs reprises étaient certainement devenus insupportables, insurmontables pour que l'irrémédiable se produise. Ton avenir devait être tout autre. C'est au chef de service que j'aurais voulu m'adresser pour lui transmettre le flambeau de la chirurgie cardio-vasculaire du CHU et de la Faculté de Médecine. La porte tristement s'est refermée, il en est allé autrement.

Jean-Pierre, mon ami, au nom de tous nos collègues et en mon nom je te souhaite la paix de l'âme.

 

Professeur J-P. VILLEMOT