Le « Pays lorrain »  a  100 ans

` sommaire

 

Fondée en 1904 par Charles Sadoul, dirigée aujourd'hui par son fils, la revue couvre les quatre départements (site)

 

par Michel VAGNER (Est Républicain)

« Mieux connaitre la petite patrie pour mieux chérir la grande » : tel était l'objectif, à sa naissance, du  « Pays lorrain » qui fête ce samedi son centenaire. Un siècle plus tard, l'intention a quelque peu changé  - il s'agit, à l'ère de l'Europe, de cultiver les racines lorraines - mais les convictions qui animent les rédacteurs, bénévoles, de la revue restent les mêmes : de l'inédit, rien que de l'inédit, toujours de l'inédit... « Notre sélection est sévère, un article sur quatre est refusé sans appel », explique l'actuel rédacteur en chef, Paul Sadoul.

Bimensuelle à l'origine, trimestrielle aujourd'hui, la publication qui couvre « Meurthe, Meuse, Moselle, Vosges et Bassigny » ne se compare pas à un news magazine en quête de « scoops ».

C'est un périodique qui explore l'histoire, y compris contemporaine, sous toutes ses formes, mais avec des angles nouveaux et originaux, doublé d’une chronique de la vie culturelle et universitaire régionale. On y évoque aussi bien, dans l'un des derniers numéros, les horreurs de la guerre de Trente Ans qui a vu Nancy perdre la moitié de sa population et Epinal plus de75%, que le rapprochement au sein d'ARTEM de l'Ecole des Mines avec l’Institut commercial de Nancy et l'École nationale supérieure d'art de Nancy.

Maurice Barrès, pourtant, ne prédisait pas grand avenir à cette revue, qu'il a aidée de sa plume. Elle ne devait pas durer plus que quelques mois lorsque le 10 janvier 1904, elle est sortie des presses, à l'initiative de l'Union régionaliste lorraine.

Charles Sadoul était aux commandes. A la tête d’un cabinet d'assurances qui lui laissait du temps libre, ce Nancéien cultivé s'est investi « avec patriotisme » dans le projet : « Il s’inscrivait dans le dynamisme de l’époque » explique son fils, le professeur Paul Sadoul, « Nancy était la capitale de l’Est de la France, face à Strasbourg annexée, avec laquelle il fallait rivaliser »

Modeste à ses débuts, vendue à un prix modéré sans subvention, la revue rencontre plus qu’un succès d'estime, Les collaborations sont nombreuses (Gaston Varenne, Victor Prouvé. Christian Pfister, Robert Pa­risot, Chepfer...). Au sommaire : les traditions et le  « temps présent ».

Le comité de rédaction réunit un groupe de jeunes gens, des trentenaires, souvent des copains de lycéens qui donnent du souffle aux pages : 400 pour la première année, 800 à la veille de la guerre.

Obligée de s'interrompre, la revue ne renaît qu’en 1919. Les fils prennent la suite des pères. Dès 1921, Georges Sadoul, l’autre enfant de Charles, futur historien du cinéma, se lance dans la chronique percutante. Un autre Sadoul, Louis, l'oncle, prend les rênes avec Pierre Marot qui sera plus tard directeur de l’Ecole des Chartes. Charles Sadoul meurt en 1930, Louis en 1937. Le deuxième conflit mondial porte un nouveau coup au du  « Pays lorrain » qui reparait, sous forme d’un cahier en 1948,  puis quatre fois par an à partir de 1951.

Pierre Marot, avec l'accord de la veuve de Charles Sadoul, obtient que la Société d'archéologie patronne désormais la publication, pour lui assurer une assise.

L’historien René Taveneaux  lui succède en 1975,  à la fois comme président de la Société d’archéologie et comme directeur de la revue.

Il passe le relais en 1985 au doyen Beau qui abandonne deux ans plus tard : « Mon nom est alors sorti d'un chapeau » raconte Paul Sadoul. « la charge m’est tombée dessus comme on attrape la grippe ».

En retraite de l’université et de l’hôpital, le médecin, spécialiste de l’insuffisance respiratoire, renoue avec la chronique et veille à publier trente articles par an « au moins ».

Un siècle après son père, Paul Sadoul croit à la pérennité du  « Pays lorrain » parce qu’il est « un ciment entre les Lorrains ».