JOB Louis

1878-1957

` sommaire

Autres photos : cliquez ici

ELOGE FUNEBRE

Le Professeur Louis Job est né le 21 mars 1878 à Lunéville où son père exerçait la médecine générale et où sa conscience et son dévouement lui avaient attiré une nombreuse clientèle. Ses deux frères aînés avaient déjà suivi l'exemple paternel et fait de solides études médicales à la Faculté de Nancy. C'est dans cette ambiance familiale particulière que dès ses études secondaires au collège de Lunéville il décida de suivre l'exemple de son père et de ses frères et de devenir médecin lui aussi. Inscrit à la Faculté, Louis Job se fit de suite remarquer par le sérieux de son travail et encouragé par ses maîtres à suivre la voie des concours hospitaliers. Dès la fin de sa deuxième année il est brillamment reçu au concours d'externat des hôpitaux et travaille dans les services des Professeurs Gross et Parisot et des Agrégés Haushalter, Etienne, Louis Spillmann et Gaston Michel qui, connaissant ses qualités, lui conseillent de préparer l'internat. Il obtient la deuxième place au concours de 1901 derrière son ami Sencert, qui devait devenir plus tard le brillant professeur de clinique chirurgicale à la Faculté de Strasbourg retrouvée.

Sa première année d'internat le conduit chez le Professeur Agrégé Froelich qui fut pour lui, non seulement un maître, niais un ami qui sut toujours lui témoigner cette amitié et le considérait à la fin de sa carrière comme ayant été le meilleur de ses internes. Sa deuxième année le trouve chez le Professeur Paul Spillmann, nom prestigieux de cette époque médicale où commençait la lutte antituberculeuse ! Sous son autorité, il étudie la tuberculose dans les taudis de Nancy et publie une monographie importante dans laquelle il traite de l'hospitalisation des tuberculeux.

Bien que séduit par la médecine générale, sa troisième année d'internat passée à la Maternité Départementale devait décider de sa carrière future; toutefois c'est à son premier maître, le Professeur Froelich, qu'il demande le sujet de sa thèse de doctorat dans laquelle il traite « de la réduction non sanglante des luxations congénitales de la hanche ».

Très rapidement il ouvre à Nancy un cabinet de médecine générale, afin de continuer à suivre l'enseignement du Professeur Herrgott, aux côtés duquel il trouve les Professeurs Agrégés Schuhl et Fruhinsholz dont il admire la justesse du diagnostic et l'habileté opératoire, à une époque où tout le problème de l'accouchement dans les cas difficiles consistait à extraire l'enfant par les voies naturelles. Des circonstances peu favorables et indépendantes de sa volonté le forcent à attendre le concours de clinicat d'obstétrique de 1908 où il est reçu après d'excellentes épreuves. Sa vie dès lors est partagée entre son activité de praticien, dont la clientèle augmentait rapidement, et la Maternité Départementale où les urgences étaient fort nombreuses de jour comme de nuit.

La mobilisation l'enlève au foyer qu'il venait de créer et à sa clientèle, rejoignant dès le 2 août 1914 le 69ème régiment d'infanterie, comme médecin de bataillon. Son courage tranquille et son dévouement lui conquièrent les sympathies de tous et le 2 novembre 1914 il est fait, sur le front des troupes, Chevalier de la Légion d'Honneur, après l'attaque de la ferme de Léomont, où avec un mépris total du danger il s'était porté au secours de son colonel blessé demeuré sous le feu de l'ennemi. Dès lors il est avec le 20ème corps d'armée jusqu'au 17 octobre 1917, date à laquelle il est affecté aux troupes d'Algérie. Successivement médecin chef de l'Hôpital d'Aumale, médecin chef de la place d'Alger, puis d'un groupe de bataillons de tirailleurs algériens, il est démobilisé le 19 février 1919.

Revenu à Nancy, il retrouve une clientèle fidèle de médecine générale et d'accouchement, à laquelle il se dévoue en même temps qu'il prépare l'agrégation et après le concours de 1920 il est institué agrégé d'obstétrique le 1er novembre de la même année. En cette qualité il est chargé du cours de médecine opératoire obstétricale qu'il professe jusqu'en 1929. Son enseignement précis, simple est très suivi par les étudiants qui acquièrent auprès de lui les notions de technique opératoire indispensables à tout praticien.

Membre de la réunion d'Obstétrique et de Gynécologie de Nancy, il y fait de nombreuses communications dont les explications qu'il en donne sont toutes empreintes d'un grand sens clinique. Vice-président de la réunion de 1924 à 1926. il en est président de 1926 à 1928, professeur à l'Ecole de Sages-Femmes Départementale en 1924, il est chargé de l'enseignement de l'anatomie et de la physiologie et peu après le Conseil Général de Meurthe-et-Moselle le charge d un cours de puériculture après accord avec la Faculté.

Officier d'Académie en 1912, il est nommé Officier de l'Instruction Publique en juillet 1922 et en 1930 il reçoit la médaille d'argent de l'Assistance Publique en récompense de son dévouement à la Maison Maternelle de la Maternité dont il avait la charge dès sa création en 1926. Il s'y occupe activement de l'allaitement maternel, encourageant sans cesse les jeunes mères auxquelles il en montre l'importance pour la croissance normale de leur enfant. Non content d'être un bon puériculteur, il se penche paternellement sur leurs misères morales avec une délicatesse et une bonté qui le font aimer de toutes. Partisan convaincu de la nécessité de l'allaitement maternel, il ne cantonne pas son action à la Maternité, il fait au dehors, dans diverses oeuvres de protection maternelle et infantile, des conférences de vulgarisation de puériculture où des jeunes mères toujours bien intentionnées, mais souvent ignorantes, viennent chercher ses conseils.

Agrégé libre en 1929, la Faculté lui attribue une charge de cours complémentaires d'accouchement sans limite de temps et le 10 mars, sur proposition de la Faculté, le Ministère de l'Education Nationale lui confère le titre de Professeur sans chaire, reconnaissant ainsi ses qualités didactiques. Ses occupations universitaires et hospitalières ne lui font pas oublier une clientèle fidèle, il est non seulement le médecin, mais l'ami auquel on confie ses peines, le conseiller respecté et toujours écouté.

La mobilisation de 1939 le retrouve médecin lieutenant-colonel de réserve, Officier de la Légion d'Honneur, affecté à l'Hôpital Militaire de Toul en qualité de médecin chef. Evacué avec tout son personnel, il communique à tous sa foi dans l'avenir ; comme en 1914 son courage tranquille réconforte les inquiets. Dès l'armistice il se retire en Dordogne où, avec Mme Job, il recrée autour de lui une petite communauté lorraine grâce à laquelle les années de cet exil forcé lui paraissent moins dures.

Révoqué par le gouvernement de Vichy, il est réintégré dans ses fonctions universitaires à dater du 21 décembre 1944 par arrêté ministériel du 4 octobre 1944. Admis à faire valoir ses droits à une pension de retraite, le titre de professeur honoraire lui est conféré le 10 septembre 1945. La libération de Nancy lui permet enfin de réoccuper son appartement que des amis dévoués ont pu préserver en partie du pillage de l'occupant. Peu à peu repris par une clientèle dont volontairement il diminue le nombre, il redevient le médecin souriant et dévoué qu'il a toujours été.

Professeur honoraire, il assiste assidûment aux séances du Conseil de Faculté, participant avec discrétion aux discussions soulevées et où ses avis sont toujours marqués de sagesse. Demeuré très alerte malgré son âge, il faisait l'admiration de tous : toujours de caractère enjoué, volontiers taquin avec ceux qu'il aimait, il cachait sous une bonhomie souriante une grande bonté qui était le fond de son caractère. Au cours de sa maladie, oublieux de lui-même, il ne pensait qu'à son entourage et surtout à la fidèle compagne de toute sa vie dont l'admirable dévouement a adouci ses derniers moments.

Il est mort à Nancy le 8 octobre 1957. Modeste, il avait voulu des obsèques très simples, mais la ferveur de la foule qui avait tenu à l'accompagner au cimetière de Lunéville où il repose à côté des siens, fut le témoignage des sentiments qu'il avait su inspirer. Ses collègues, ses élèves et ses amis conserveront pieusement de lui le souvenir d'un grand honnête homme !