MATHIEU Louis

 

1895-1985

 

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ELOGE FUNEBRE

 

Le Docteur Louis MATHIEU, fondateur de l'école cardiologique nancéienne, s'est éteint le 10 mars 1985, entouré de l'affection des siens et ayant gardé jusqu'à la fin, en dépit de ses misères physiques, toute sa vivacité d'esprit.

Né le 7 septembre 1895 à Besançon, il avait suivi très jeune à Nancy son père, professeur d'histoire, de qui il tenait la solide formation d'humaniste qu'admiraient tous ses élèves : ne lisait-il pas, à la fin de sa vie, les auteurs grecs et latins dans le texte ! Mobilisé dans l'infanterie en 1915, il connut les combats de la grande guerre, notamment au Chemin des Dames, fut blessé, décoré de la Croix de guerre avec 4 citations et de la Légion d'Honneur, il devait ensuite reprendre ses études et être reçu major du Concours d'Internat en 1920. Orienté d'abord vers la toxicologie dans le laboratoire du Professeur GARNIER, dont il fut le préparateur jusqu'en 1923, il consacra sa thèse à ce qu'on intitulerait actuellement la « pharmacocinétique » de l'Arsenic organique, qu'il étudia au laboratoire de la Clinique dermato-syphiligraphique du Professeur SPILLMANN. Chef de Clinique médicale en 1924, il consacra une série de publications à la neurologie dans le Service du Professeur ETIENNE, où il fut l'élève de CORNIL, alors Agrégé. Médecin des Hôpitaux en 1927, il s'orientait résolument vers la Cardiologie dans son service de consultations externes qu'il équipait d'un galvanomètre à corde, consacrant dès cette époque une série de publications aux blocs auriculo-ventriculaires (en particulier congénitaux), aux blocs de branche, à la fibrillation et au flutter auriculaires.

C'est à cette époque qu'il bénéficia de l'enseignement et de l'amitié de Charles LAUBRY. Lors de la création de la Société française de Cardiologie, il figurait parmi les pionniers de la discipline qui constituèrent le petit noyau des membres fondateurs. Demeuré longtemps le seul cardiologue consultant pour toute la région lorraine et le Luxembourg, il déploya une énorme activité de clientèle ; fut investi en outre de responsabilités ordinales pendant la difficile période de l'Occupation ; ce qui ne l'empêchait pas, très tôt levé, de passer de longues matinées dans son Service de « Médecine Complémentaire », devenu par la suite le Service de Cardiologie, et d'y former de nombreux élèves. Il n'obtint pas la consécration universitaire de l'Agrégation, mais n'en devait jamais garder d'amertume. C'est, en revanche, le Conseil de Faculté qui lui confiait, en 1949, la charge de cours de Cardiologie et, dès sa création en 1950, la responsabilité de l'enseignement du CES. Il sut très tôt pressentir l'explosion des techniques d'investigation en Cardiologie, créait en 1950, avec son élève physiologiste Pierre ARNOULD, le laboratoire d'Hémodynamique et équipait, parfois de ses deniers, son Service en installations de pointe : vectocardiographie, tracés synchrones. Il encouragea et aida, grâce à une étroite collaboration favorisée par la proximité de leurs deux services, le Professeur Pierre CHALNOT à mettre sur pied la Chirurgie cardiaque à Nancy.

 

De sa formation d'interniste, Louis MATHIEU gardait le goût des travaux pluridisciplinaires : complications neurologiques et foyers épileptogènes chez les cardiaques, étude des volumes pulmonaires chez les mitraux, altérations hépatocellulaires de l'infarctus du myocarde, modification des compartiments liquidiens chez les artéritiques, etc. Pressentant le développement que connaîtraient certains secteurs de notre discipline (rythmologie, cardiologie pédiatrique), il s'efforçait d'y orienter ses élèves. A la Société française de Cardiologie, ses interventions étaient marquées au coin du bons sens et reflétaient l'énorme expérience clinique qu'il avait accumulée et que tous lui reconnaissaient.

Profondément croyant, Louis MATHIEU avait élevé une nombreuse famille, il était particulièrement fier de ses six enfants et de ses 24 petits enfants. De ses deux fils médecins, l'un Jean, est rhumatologue et l'autre perpétue la tradition cardiologique : Pierre MATHIEU a succédé à son Maître le Professeur CHALNOT à la tête de la Chirurgie Cardiaque nancéienne.

A tous ceux qui l'ont connu et ont bénéficié de son enseignement, le Docteur Louis MATHIEU laissera le souvenir d'un Médecin éminent et d'un homme de cœur.

 

Professeur C. PERNOT