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L'Ecole de chirurgie de guerre de la Faculté de Médecine de Nancy

A. LARCAN

Texte paru dans : Histoire des sciences médicales, no 2, 2000, p. 171-178

 

La guerre franco-allemande de 1870 et le traité de Francfort entraînant l'annexion de l'Alsace et de la partie mosellane de la Lorraine vont faire de Nancy la capitale de l'Est français et justifier le transfèrement de la Faculté de Strasbourg à l'Université de Nancy. L'université lorraine devait faire rayonner la culture française face à Heidelberg, Tubingen et à la nouvelle Université allemande de Strasbourg.

La ville, dont la population a augmenté, a un développement industriel rapide et à 20 kms de la frontière héberge une importante garnison d'environ 20000 hommes (la 1lème division d'infanterie ou division de fer). Elle est le siège du XXème corps et du commandement des troupes de couverture. Dans cette ambiance où l'on ne peut s'empêcher, face à la "ligne bleue des Vosges", d'évoquer un nouveau conflit et même une revanche, les médecins civils qui sont pour la plupart officiers du cadre de complément, c'est-à-dire officiers de réserve, se préparent aux côtés de leurs camarades d'active du XXème corps sous le commandement du Médecin Général Schneider, et de l'Hôpital Militaire Sédillot qui ouvre ses portes à la veille de la guerre succédant au vétuste Hôpital Saint-Jean. Nancy qui ne sera pas fortifié car trop proche de la frontière, devient, couverte par la place forte de Toul, le pivot et l'enjeu de la manœuvre aux frontières face à la menace de la "Metz-Austellung".

 

La préparation des chirurgiens au conflit

A la Faculté de Médecine, il y a deux chaires de clinique chirurgicale A et B, plus un enseignement de pathologie externe et de médecine opératoire.

Les titulaires de la chaire chirurgicale A sont successivement Edmond Simonin, l'ancien directeur de l'école, Eugène Michel, Albert Heydenreich et Théodore Weiss. A la Clinique Chirurgicale B se succèdent Philippe Rigaud et Frédéric Gross. Ces deux chirurgiens qui viennent de Strasbourg ont l'expérience de la chirurgie de guerre ayant assuré, à eux deux, les soins chirurgicaux dans les hospices de Strasbourg aux victimes civiles d'un siège et de bombardements de sept semaines.

Les Strasbourgeois et en particulier Frédéric Gross avaient été des élèves de Sédillot, illustre chirurgien militaire, directeur de 1'Ecale du Service de santé et auteur de nombreux travaux, dont une thèse hétérodoxe sur la régularisation et la suture immédiate des plaies de guerre.

Mais celui qui s'est le plus investi dans la tâche de préparation des chirurgiens du conflit tant dans les aspects purement techniques que dans ceux de la tactique sanitaire et de la logistique est le professeur Théodore Weiss. Né à Phalsbourg en 1852 où son père était notaire, il effectuait des études de droit quand survint la guerre de 1870. Ambulancier volontaire, il se trouve à la bataille de Frœschwiller et dans l'église de Woerth, il voit de nombreux blessés, des zouaves pour la plupart, couchés sur la paille et au milieu d'eux, un malheureux aide-major tentant de leur porter secours. La vocation de Weiss est éveillée. Il opte pour les études médicales, s'inscrit à la Faculté de Médecine de Paris, devient Interne des Hôpitaux et l'élève de Guérin, de Duplay, de Verneuil. Reçu au concours de l'Agrégation de chirurgie en 1880, il est affecté à Nancy et succède à Heydenreich (mort à la suite d'une piqûre anatomique) à la tête de la Clinique chirurgicale A en 1898.

Médecin Principal de 2ème classe (galons de Lieutenant-Colonel), il participe très activement à l'Ecole d'instruction des O.R. et de l'armée territoriale de la 20ème région. Il rédige avec Février (médecin militaire et agrégé de chirurgie) des études sur les blessures par projectiles de petit calibre. Mais son œuvre maîtresse dans ce domaine est la rédaction de deux monographies de chirurgie de guerre publiées en 1912 et en 1914 qui doivent retenir l'attention.

 

Les monographies de Weiss

L’une et l’autre imprimée par l'imprimerie Berger-Levrault spécialisée dans les ouvrages militaires, elles ont pour titre, la première parue en 1912 : Les blessures de guerre par les armes et la seconde parue en 1914 : Les leçons sanitaires de la guerre des Balkans.

De même qu'une armée et surtout les états-majors doivent étudier dans le détail les conflits précédents et surtout les plus récents, Weiss s'attache à une relation des derniers conflits : guerre du Transwall (1899), guerre russo-japonaise (1905) et surtout les deux dernières guerres balkaniques (1912) conflits opposant Bulgares - Grecs, Monténégrins et Serbes aux Turcs puis Grecs et Serbes aux Bulgares. Weiss pour rédiger ses monographies dispose d'une très importante documentation, d'une iconographie impressionnante et s'il n'est pas allé lui-même sur le terrain des opérations, il a sollicité de très nombreux témoignages de chirurgiens, ayant été appelés au titre de la Croix-Rouge Internationale, et surtout il dispose d'un "réseau" de correspondants locaux qui sont élèves ou anciens élèves de la Faculté de Nancy. Les deux ouvrages frappent par leur clarté, leur précision, leur illustration parfaitement présentée et utilisée, et surtout par le travail de réflexion sur les faits, les déductions pratiques qui s'imposent au Service de Santé français.

Il y a évidemment à la même période toute une série de témoignages surtout chirurgicaux de chirurgiens français et européens. Il y a aussi une réflexion de l'école du Val-de-Grâce dont le chef de file est le Médecin Général Delorme qui a été très associé au règlement du service de santé français qui date de 1910, mais dont le raisonnement tactique chirurgical s'appuie surtout sur le conflit russo-japonais. De toutes ces études, celle de Weiss est certainement la plus complète, la plus pertinente. C'est lui qui a le mieux perçu le changement de nature qui s'effectue entre les deux guerres balkaniques ; l'artillerie à tir rapide plus active lors de la deuxième guerre entraîne une augmentation très nette des blessures par obus, une modification de la nature des blessures, un risque accru d'infections gangreneuses et des conséquences beaucoup plus graves des évacuations prolongées vers les centres hospitaliers de la quasi-totalité des blessés. La comparaison des deux monographies parues à un an de distance montre bien la capacité d'adaptation de Weiss à une réalité nouvelle et aussi sa volonté de faire connaître très rapidement les conclusions qu'il en tire pour la tactique sanitaire. Les deux mémoires donnent d'abord une étude détaillée des pertes humaines au cours des différents conflits : tués et blessés surtout, auxquels s'ajoutent souvent les malades surtout cholériques, ratio tués-blessés, pertes totales-pertes santé (blessés, malades) pour une campagne, une bataille, un jour de guerre, une unité.

Les blessures sont soit légères, soit graves ou très graves. Elles sont uniques ou multiples. Elles sont classées selon leur topographie tête et cou, thorax, abdomen, membres. Elles sont le fait des armes à feu et de moins en moins (3 %) des armes blanches (sabre, baïonnette). Une étude approfondie avec présentation des divers projectiles concerne les effets des balles tirées par les fusils (Lebel, Mauser, Mannlicher). Weiss présente les divers types de balles (rondes, cylindro-coniques, cylindro-ogivales, "humanitaires".... dum-dum, dum-dumisées et surtout halles pointues D ou S). Il en rappelle les composantes (plomb durci, laiton, acier Maillechort), le diamètre (< à 8 mm), le schéma habituel (enveloppe, noyau, culot), enfin et surtout les effets sur le corps humain en distinguant les coups à bout portant et à distance, les effets de plein fouet et les tirs obliques ou transversaux, etc...

Il s'intéresse aussi aux obus : à fusée fusante dispersant des balles de plomb (ce sont les "shrapnells" dénommés encore "arrosoirs du diable") et à fusée percutante, ce sont les obus brisants ou explosifs dont la gerbe latérale projette des fragments-couteaux biseautés.

Si les balles de fusil dont le trajet dans le corps est extrêmement capricieux sont souvent bien tolérées et donnent, en effet, assez peu d'infections, il n'en est pas de même des balles de "shrapnells" qui créent souvent des polycriblages, des lésions vasculaires et des risques d'infection et encore plus, des éclats d'obus qui déterminent des plaies atypiques, de vastes délabrements et un risque majeur d'infection.

Weiss donne une étude détaillée du fonctionnement du Service de santé en insistant sur le personnel (médecins, infirmiers, brancardiers) et leur degré de compétence et d'entraînement, le matériel (brancards, pansements, matériel chirurgical) des formations sanitaires (postes de secours, ambulances, hôpitaux), et les moyens d'évacuation (charrettes, camions, ambulances, automobiles, trains, navires).

Du conflit russo-japonais, il retient trois notions : l'impossibilité de réaliser des soins même élémentaires sur la ligne de feu, le danger de la mobilisation des blessés de l'abdomen, et la priorité donnée par les Russes à l'évacuation à outrance de tous les blessés. Le poste de secours ou l'ambulance de l'avant fonctionnant selon la formule de Rapp comme "un bureau d'emballage doublé d'un bureau d'expédition".

Il remarque :

- l'absence totale d'organisation sanitaire de l'armée ottomane et par contre les soins excellents donnés dans les hôpitaux de Constantinople aux blessés qui pouvaient y parvenir,

- les insuffisances criantes du service de santé bulgare, l'extrême lenteur des évacuations réalisées par chars à buffles ou par trains et là encore, les soins de qualité donnés à Sofia qui ne recevait que des blessés légers, les autres étant morts sur place ou lors du transport.

- l'excellente organisation du service de santé serbe disposant d'un personnel préparé, d'un matériel adapté (caisses, armoires) et sachant utiliser différents moyens de transport (dont des convois ferroviaires bien aménagés) et ayant su pousser les ambulances internationales à proximité du front et mettre en place un dispositif échelonné d'évacuations.

- enfin, le fonctionnement satisfaisant et assez rapide du service de santé grec ayant mis au point la continuité du transport sur le même brancard, imposé la notion de triage et le fonctionnement des hôpitaux de campagne dans des organes interchangeables doublés de tentes d'hospitalisation.

Les conclusions applicables au service de santé français sont pour Weiss

- la nécessité d'une protection aussi immédiate que possible des plaies par un pansement individuel. Il a noté l'instruction poussée des Serbes et des Grecs et les qualités du pansement serbe (deux paquets individuels cousus au côté interne de la tunique, pansement s'ouvrant par simple traction sur un fil, pièces cousues ensemble évitant la contamination) et demande des modifications du pansement français (porté dans la poche intérieure de la veste ou de la capote dont l'enveloppe est difficile à déchirer et dont les pièces indépendantes peuvent s'échapper et se souiller au contact du sol).

Il rappelle que le pansement qui fait merveille sur les blessures à petits orifices peut être insuffisant dans les plaies larges et anfractueuses, qu'il n'est que d'attente et qu'il doit être revu ou remplacé dans les diverses haltes au poste de secours ou à l'ambulance. Il préconise l'emploi de la teinture d'iode pour les plaies récentes, de l'eau oxygénée ou du permanganate pour les plaies infectées. Il recommande la généralisation de l'emplâtre adhésif (leucoplaste, vulcanoplaste et le "mastisol" serbe, liquide agglutinant à base de benzine, d'alcool et de térébenthine) qui obtient l'adhésion des compresses, la stérilisation de la peau, l'immobilité absolue du pansement lors du transport. En ce qui concerne les interventions chirurgicales, il estime qu'il faut être rigoureusement conservateur dans les premières heures, s'abstenir de toute manœuvre intempestive (sondage, tamponnement, recherche de corps étrangers, ablation d'esquilles), et que sauf extrême urgence, il ne faut faire d'intervention que dans une formation équipée mais il préconise l'adaptation en personnel, matériel et mobilité des formations de campagne.

Les enseignements les plus importants que tire Weiss de ces opérations concernent la chaîne des évacuations. Sur la ligne de feu, aidés par les brancardiers régimentaires, les combattants doivent savoir effectuer eux-mêmes leurs premiers pansements et se rassembler en "nids de blessés". Relevés, ils sont amenés aux postes de secours où l'on réalise des gestes simples : badigeonnage iodé, pansement, immobilisation, compression des vaisseaux.

 Weiss prend parti pour une bonne utilisation des ambulances de l'avant (ambulances volantes, ambulances immobilisées), pour le traitement dans de bonnes conditions des "intransportables'". Il demande un éclairage suffisant et des chirurgiens professionnels pour réaliser des gestes rapides et salvateurs : débridement, drainage, trépanation. Des centres hospitaliers de seconde ligne (futurs hôpitaux d'évacuation) ne gardent après triage que les blessés légers qui rejoindraient rapidement le front et les inévacuables, tous les autres gagnant les hôpitaux de l'arrière. Weiss insiste sur l'intérêt du regroupement des blessés selon la topographie de la nature des blessures, par exemple des membres inférieurs, la nécessité de constituer des équipes chirurgicales capables d'assurer un bon rendement opératoire sous la direction de "Maîtres" de la chirurgie de guerre, l'intérêt de la radiologie de campagne.

Il prend enfin parti dans la controverse passionnée concernant les évacuations qui s'était manifestée en particulier à la Société de médecine militaire française en 1912 qui opposait les partisans de l'évacuation passive à la russe (car selon Le Fort "ce que les blessés perdent en route, ils le récupèrent par la qualité des soins qu'ils trouveront dans les hôpitaux de l'intérieur'"), et ceux qui estimaient qu'il convient de réaliser un triage, une évacuation échelonnée avec vérification aux étapes et interventions chirurgicales dans les formations de campagne, réalisées dans les meilleures conditions possibles par un personnel qualifié pour les blessés graves, les intransportables et inévacuables. Weiss ayant noté les inconvénients majeurs des transports à grande distance prend parti nettement et plus encore que Delorme pour la deuxième solution. Il introduit pour condamner l'évacuation intensive des comparaisons statistiques opposant l'attitude bulgare à l'attitude grecque.

C'est une justification supplémentaire du triage, terme utilisé souvent par Weiss et de l'évacuation par étapes, le long d'un véritable "cordon ombilical" reliant les centres hospitaliers de 1ère ligne à ceux du territoire.

 

Les chirurgiens nancéiens lors du conflit : Th. Weiss, Aimé Hamant, Georges Gross.

Sur le terrain, après le déclenchement des hostilités,  les chirurgiens nancéiens mobilisés vont appliquer et adapter ces données encore un peu théoriques sur lesquelles ils avaient réfléchi.

Weiss lui-même est affecté en tant que chef de service à l'Hôpital Militaire Sédillot à Nancy, il a comme collaborateur Georges Gross, fils du Doyen Frédéric Gross. Il reçoit les blessés de la bataille du Grand Couronné et va réaliser très vite pour les plaies par balles tirées à courtes distances et surtout par éclats d'obus, des débridements larges, préventifs et curatifs, avec incision complémentaire, mise à jour du trajet du projectile, parage des orifices d'entrée (et de sortie éventuelle), ablation des tissus souillés, contus et souvent des fragments osseux et esquilles, nettoyage soigneux par solutions antiseptiques et termine par un drainage. Il utilise cette technique même en cas de phlegmon gazeux et de gangrène en ajoutant les sérums antigangréneux et les injections d'oxygène. Il ne réalise des amputations que de façon très limitée et rapporte une statistique de 1913 plaies de guerre en ne pratiquant que vingt amputations pour écrasement complet, gangrène totale par lésion vasculaire, septicémie ou choc toxi-infectieux rebelle au débridement-drainage.

Son chef de clinique en 1914, Aimé Hamant, a été mobilisé à l'ambulance 14/20 et après les batailles de Lorraine, s'établit sur la Somme à Montdidier. Il reçoit dans sa formation uniquement des blessés des membres. Il est le seul chirurgien et il a instruit des équipes d'infirmiers selon la procédure des 3 x 8. Il opère dès leur arrivée les blessés et surveille lui-même les pansements. Il recherche systématiquement balles, éclats et débris vestimentaires, et met au point une technique de parage en s'efforçant d'utiliser et d'agrandir les plaies existantes ; il dissèque les tissus (peau, tissu cellulaire, muscles) en allant jusqu'aux tissus sains et saignants sans décollements intempestifs et en veillant à ne pas écraser les tissus avec les pinces et à réaliser une hémostase minutieuse. Puis il en vient à rapprocher les bords de la plaie, et enfin à réaliser une suture précoce avec ou sans méchage. Cette technique ne peut être réalisée que si le blessé est amené précocement, sans manipulation antérieure ou intempestive, si la topographie anatomique le permet et si le chirurgien d'expérience peut suivre lui-même son blessé. C'est alors que Gaudier, professeur à Lille, plus élevé en grade, vient "coiffer" Hamant. Il ne participe pas beaucoup à la technique, préoccupé par le sort de sa famille ; il jouait de l'orgue, sa passion. Il publie avec Hamant les résultats obtenus par la suture primitive immédiate ou précoce à Royalieu près de Compiègne. Mais il oublie Hamant dans les mémoires ultérieurs présentés à la demande de Mathieu devant la Société de Chirurgie.

Entre temps, Hamant a été muté à l'ambulance du corps colonial recevant des ypérités, il est lui-même gazé et évacué pour tuberculose pulmonaire. Parallèlement, Lemaitre, sans citer Gaudier, publie ses propres résultats sur la suture primitive. Les critiques furent vives mais les constatations surtout anatomo-pathologiques de Noël Fiessinger et les témoignages des inspections en particulier de Nimier consacrèrent à partir d'avril 1915 cette technique attribuée soit à Gaudier, soit à Lemaître mais rarement à son véritable auteur Aimé Hamant. Il fut titulaire de la chaire de clinique chirurgicale B de 1927 à 1953.

Il faut encore souligner la contribution à la suture primitive de Georges Gross, devenu médecin-chef de l'auto chir 12 et chirurgien consultant d'armée qui se fait le défenseur de cette technique non seulement pour les plaies des membres mais l'applique aussi aux plaies articulaires (avec Loubat) et aux plaies crânio-cérébrales (avec Houdard). Il rappelle les critères de réalisation : temps écoulé entre la blessure et l'intervention suffisamment court, possibilité anatomique de réaliser une excision complète et correcte des tissus contus, expérience clinique. Mais il va apporter un correctif bactériologique très intéressant en utilisant les techniques bactériologiques quantitatives et qualitatives mises au point par Tissiez dans les Flandres. Celui-ci avait constaté que la flore anaérobie responsable des gangrènes coexiste avec une flore aérobie, que la flore varie pour chaque blessé et pour le même blessé parfois pour chacune des blessures et il rend le streptocoque associé responsable des gangrènes foudroyantes et des suppurations.

Gross qui réalise désormais près de 80% de sutures primitives va après étude bactériologique conclure que toute plaie de guerre qui ne contient pas de streptocoque doit être suturée et que par contre la suture n'est possible qu'à partir du 21ème .jour s'il existe un streptocoque et qu'il faut désunir volontairement la suture si l'on a connaissance de ce germe et si l'on veut éviter suppuration et surtout infection toxémique mortelle.

La dernière contribution majeure est celle d'un élève de Frédéric Gross, agrégé de chirurgie, Louis Sencert, auteur de l'ouvrage de chirurgie vasculaire dans la célèbre collection bleu horizon, et dont nous avons souligné par ailleurs le rôle novateur et précurseur. Telles furent les recherches riches et variées des chirurgiens nancéiens dans le domaine de la chirurgie de guerre. Elles ont été trop souvent méconnues et sont aujourd'hui oubliées d'autant que les communications de guerre se faisaient à proximité du théâtre d'opérations (Bouleuse, Royalieu) et à Nancy à la Société de Médecine de Nancy, que l'information n'était pas toujours immédiate et variait selon les armées, que les médecins militaires d'active (Delorme, Nimier, Mignon), haut gradés, gardaient le contrôle de l'information et qu'enfin les chirurgiens parisiens (Duval, E. Quenu, Delbet, Lejars, Mocquot...) utilisant les tribunes de la Société de Chirurgie, de l'Académie de Médecine, de l'Académie des Sciences, monopolisaient, en quelque sorte, ce domaine nouveau de la chirurgie du temps de guerre.

Iconographie et bibliographie dans le texte cité